Quel avenir pour les média d’information avec l’IA ?

Analyse et retour d'expérience, deux mois après le lancement d'Arago.

Quel avenir pour les média d’information avec l’IA ?
Crédits : Illustration Dana / Arago

Deux mois après le lancement d'Arago, je voulais partager avec vous mes premières observations sur les opportunités et les menaces que représente la révolution technologique de l'IA pour les médias d'information et proposer quelques pistes d'action.

→ Commençons d'abord par une bonne nouvelle.

L'IA ouvre un nouvel âge d'or pour la production d'information

L'IA fournit des outils extrêmement puissants pour traiter et transformer l'information, réaliser des synthèses, résumer les faits de manière objective, analyser des documents, trouver des accroches, des idées d'angles, et décliner les contenus sous différents formats…

Par exemple, à la suite du débat Attal - Bardella, les outils IA développés par Arago ont fourni une approche plus équilibrée que de nombreux éditorialistes (Jean-Michel Apathie pourrait sûrement en convenir).

Si on décide de les adopter, les outils sont généralement assez simples à utiliser, avec une barrière technologique très basse, beaucoup de no-code, des interfaces utilisateur intuitives et des commandes en langage naturel.

Le coût d'accès aux services est très compétitif, compte tenu des gains de productivité générés.

Les technologies évoluent rapidement et il n'a jamais été aussi facile de créer et d'enrichir des contenus à partir de données, visuels, vidéos, sons…

Les questions de risques d'erreur ou de manipulations peuvent être ****honnêtement gérées si l'on s'appuie sur des méthodologies rigoureuses qui reposent sur la déontologie et le cadre éthique de la profession de journaliste (les autres professions avocats, médecins… sont dans la même situation).

La technologie de l’IA est neutre, ce sont ses applications qui portent la responsabilité. Si certaines applications de l'IA présentent des risques importants de désinformation, d’autres permettent de développer les outils les plus puissants jamais créés pour renforcer la confiance et la qualité de l'information, il faut juste s'en saisir.

Il y a donc peu de doutes sur le fait que demain, la plupart des contenus d'information seront produits ou co-produits avec de l'IA. Cela devrait laisser plus de temps aux journalistes pour se consacrer à une approche relationnelle et créative de leur métier, collecter des informations, mener des enquêtes de "terrain".

→ Voici la bonne nouvelle, regardons maintenant le côté plus sombre.

L'IA est une menace sérieuse pour la distribution et le modèle économique des médias d'information

Le principal problème posé par l'intelligence artificielle pour les médias d'information ne concerne pas la production, mais la distribution avec une baisse de la valeur des contenus et du trafic.

D'abord, la valeur moyenne des contenus va baisser, car les facilités de production vont augmenter considérablement l'offre des informations disponibles, réduisant ainsi mécaniquement leur valeur unitaire.

La valeur se concentrera sur quelques contenus stars, renforçant une économie de blockbusters, mais les contenus de faible et moyenne qualité subiront la plus forte concurrence et verront leur valeur tendre vers zéro. Cela concerne aussi les contenus de services ou de style de vie qui génèrent un trafic significatif sur les sites d'information, même les plus sérieux.

Si on ajoute, comme l'a révélé une étude récente de l'ARCOM et de la DGMIC, des perspectives peu dynamiques sur le marché publicitaire d'ici 2030, il deviendra très difficile pour les médias de rentabiliser des contenus gratuits avec de la publicité, c'est à court terme tout un marché qui va disparaître.

Par ailleurs, il faut s'attendre à une baisse considérable du trafic actuellement redirigé vers les sites d'information depuis les plateformes (mouvement déjà initié récemment avec les réseaux sociaux).

Il suffit d'utiliser un service comme Perplexity pour se rendre compte du changement de paradigme complet que représente l'IA dans le "search" : on va passer des moteurs de recherche à des moteurs de résultats où les sources d'information seront écrasées pour fournir une synthèse.

Les médias d'information vont donc faire face à un tsunami dévastateur et nous ne sommes malheureusement qu'au début des annonces de fermetures et de licenciements.

Alors, que faire ?

1/ Pour ne pas subir la révolution de l'IA, il faut d'abord adopter ce qu'elle a de positif pour augmenter l'efficacité du travail, libérer du temps pour des tâches plus créatives et relationnelles, renforcer la compétitivité et la qualité de l'information.

La première chose à faire est donc de se saisir très vite des capacités de production offertes par l'IA, en dotant les entreprises d'une vision et d'une stratégie opérationnelle, en formant toutes les équipes, en fournissant aux rédactions les bons outils, en réorganisant le travail, en adoptant une méthodologie visant à utiliser l'IA avec rigueur et créativité.

Ainsi, au niveau technique, la facilité d'accès à des outils d'interpolation des données préexistantes ouvre des portes pour un traitement beaucoup plus puissant de l'information permettant des travaux d'enquête, d'investigation et d'analyses jusqu'alors longs et coûteux à mener. La création graphique, le montage vidéo, l'écriture de lignes de code simples ou l'analyse des données seront accessibles à tous les journalistes avec quelques jours de formation.

Les groupes médias doivent se doter immédiatement de postes de CAIO (Chief AI Officer) qui piloteront cette transformation en lien direct avec la direction générale. De nombreux médias internationaux l'ont déjà fait (NYT, Quebecor, Ringier, AP, NPO, Hearst…), et les médias français tardent encore à prendre le virage.

Ce préalable est vital et toute posture attentiste ou dubitative sur l'impact réel des outils IA sur nos métiers coûtera très cher. Ceux qui font le pari aujourd'hui que ça ne marchera pas, ou que ça ne change rien, seront demain les premiers à disparaître.

2/ La seconde chose à faire est de mettre en place une stratégie de reprise du contrôle et d'autonomisation de la distribution.

Si des accords financiers et partenariats avec les grandes entreprises technologiques restent possibles et même souvent souhaitables, les revenus générés doivent être massivement investis dans la mise en place de stratégies de distribution autonomes. Les médias doivent tenir compte des erreurs du passé et refuser la désintermédiation subie par des acteurs technologiques dont ils ne contrôlent rien.

Développer sa distribution, c'est cultiver le lien direct avec son audience, au sens large et au sens noble, cela ouvre plein de possibilités et c'est passionnant. Tant au niveau marketing qu'éditorial, c'est l'occasion pour les médias de repenser leur rôle, leur organisation, leur raison d'être.

Au niveau marketing, tous les points de contacts directs doivent être travaillés et valorisés : de la newsletter à l'organisation d'événements.

Au niveau éditorial, les médias doivent être encore plus proches du public, du terrain et des sujets, ils doivent renforcer une approche rigoureuse et créative du traitement de l'actualité.

Ma conviction est que la mission et même sans doute la définition des médias demain sera de créer des liens de confiance tangibles entre le réel et le virtuel.

Une telle révolution va redessiner l'économie des médias. À terme, seuls trois types d'acteurs devraient survivre à côté des plateformes technologiques qui contrôleront encore plus qu'aujourd'hui la distribution de l'information : les médias payants (avec un modèle premium dopé à l'IA), les médias publics (dont la mission sera encore plus essentielle qu'aujourd'hui) et les micro-médias (évolution actuelle des influenceurs dont le modèle sera entièrement piloté par les entreprises de l'IA).

Pierre-Etienne Pommier

😀
Article rédigé par un humain avec une relecture de l'IA (corrections de grammaire et orthographe).

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